Retranscription partielle de l’entretien
accordé par
Mr. Max TESSIER

Paris le 1 avril 2004 à 11h30

 

 

... vous avez commencé à être critique à peu près en 1965 je crois ?

Oui vers 65 Jeune cinéma ensuite j’ai fait plusieurs revues… je suis passé à Cinéma en 67/ 68, des petites revues, ensuite Ecran…il y a eu une scission… ensuite la Revue du cinéma, de temps en temps j’écris dans Positif et dans pas mal de revues internationales aussi …

- En tant que critique, avez- vous commencé directement à écrire sur le cinéma japonais ou vous y êtes venus petit à petit…

Non j’écrivais sur le cinéma en général, par exemple dans Cinéma en 1960 et quelque, il y a énormément d’articles sur le cinéma américain ou autre, mais pas forcément japonais… mais ça m’intéressait déjà…

- Ma question porte surtout sur ce qui vous a incité à parler du cinéma japonais; n’aviez vous pas un intérêt particulier pour le Japon ou les pays asiatiques?..

Si, si mais à l’époque c’était quand même moins à la mode qu’aujourd’hui …C’est à dire qu’avec tous les moyens de communication, tous les médias actuels, c’est beaucoup plus facile… à la limite on a presque plus besoin d’aller au Japon... à l’époque ça n’existait pas, … et moi j’étais le seul critique français, enfin presque le seul, à aller au Japon à partir des années 70, en m’intéressant vraiment au cinéma japonais en général et non pas à quelques auteurs comme c’était le cas à l’époque (et c’est toujours le cas actuellement). On écrivait essentiellement sur Mizoguchi, Kurosawa … et quelques autres comme Kobayashi, Shindo, … enfin tous ceux qui sortent aujourd’hui en DVD et qui n’étaient à l’époque visible que sur écran…

....je m’intéressais au cinéma en général sauf que, effectivement, j’ai eu un coup de foudre ou un coup de cœur pour le Japon assez tôt, au début des années 60…et il y a eu une manifestation fondamentale pour la connaissance du cinéma japonais à Paris …c’est la grande rétrospective qu’il y a eu à la cinémathèque française en 63 à Chaillot qui venait d’ouvrir, et on a vu… dans le plus grand désordre parce que c’était l’époque Langlois et que c’est pas comme aujourd’hui où tout est fiché.
Je pense qu’il avait été demandé à des critiques japonais de faire une sélection et il y avait une centaine de films dont certains pas sous titrés, d’autres sous titrés en anglais, d’autres en allemand, …On a pu découvrir Ozu par exemple ou quelques films de Ozu qui était totalement inconnu, qu’on ne connaissait que de nom dans les histoires du cinéma japonais en anglais, notamment dans « La rue Tchi »…et puis d’autres Naruse… Kinoshita…tout ça dans le plus grand désordre mais malgré tout, ça a été véritablement un déclic pour la connaissance du cinéma japonais.. outre les quelques Mizoguchi, Kuraosawa et quelques films qui étaient sortis dans les années 50…

 

En fait c’est à travers les films que vous avez découvert le Japon et pas l’inverse…

Oui, oui..

Ce n’était pas un intérêt d’abord pour le Japon…

c’est vrai que le cinéma m’a beaucoup aidé, ... je me suis intéressé à la littérature, à l’art japonais, au théâtre…il y avait quand même déjà des troupes de Kabuki ou de Nô qui venaient à Paris et donc j’ai étudié le japonais dans les années 60 à « Langue ZO » et par conséquent je n’attendais qu’une seule occasion, c’était d’aller au Japon. J’ai pu le faire financièrement en 73, il y a plus de 30 ans et j’ai fait un séjour de trois mois ou j’ai vu beaucoup de choses…. en plus j’étais privilégié parce que j’étais le seul Français et donc j’ai pu voir tout ce que je voulais au Watching Center de Tokyo...

 

Vous avez entrepris ce voyage parce que ça vous semblait nécessaire pour la compréhension des films ou c’était juste pour découvrir la culture japonaise ?

Je crois que… le cinéma c’est quelque chose à part; c’est vrai que l’on peut apprécier le cinéma sans avoir d’autres références culturelles, mais enfin pour moi, disons que je suis de la vieille génération et que je considère au contraire qu’il faut quand même aller dans le pays et découvrir… parce que les références sont complètement différentes… Je n’imagine pas un spécialiste du cinéma américain qui ne soit jamais allé aux Etats Unis, qui ne connaisse pas la langue, ou un spécialiste du cinéma italien comme Jean Gilly par exemple qui est de la même génération que moi… or maintenant ce que je vois, c’est qu’il y a énormément de jeunes critiques qui voient très facilement ( puisqu’il y en a énormément) beaucoup de films dans les festivals, beaucoup plus qui sortent qu’avant et en DVD, et qui n’ont aucune connaissance ou c’est très superficielle...

Et d’être allé au Japon, ça vous a aidé à la lecture des films, à la compréhension?…

Beaucoup parce que justement, si l’on comprend certains dialogues, certaines façons de parler, certaines expressions, certaines coutumes…en tout cas dans les films traditionnels, historiques ou contemporains de l’époque, ça aide beaucoup, alors que, en général, je ne dis pas tout le monde mais quand même très souvent, l’approche du cinéma japonais par la critique française est très abstraite…

 

 

Quant au retard de la diffusion des films japonais en france, vous avez beaucoup accusé les distributeurs , ça revient régulièrement dans vos articles…mais sont-ils les seuls fautifs ? une part de responsabilité ne revenait-elle pas aux producteurs, notamment quand vous parlez de films d’exportation dans les années 50…

Oui mais c’est assez complexe… c’est vrai que maintenant les choses ont changé depuis au moins 10 ans, mais à l’époque, il y avait un manque de curiosité des distributeurs, mais aussi des spectateurs, donc on ne peut pas toujours accuser les distributeurs parce qu’il y en a qui essayaient de sortir des films japonais et puis ça ne marchait pas du tout …il n’y avait pas le système d’aide qu’il y a aujourd’hui, maintenant on peut sortir n’importe quoi, de toute façon c’est le CNC qui paiera… mais par exemple Ozu c’était risqué,…or je crois que Voyage à Tokyo a fait plus de 100 000 entrées à Paris à l’époque, il me semble…en tout cas un chiffre énorme par rapport à ce que l’on attendait…peut-être qu’au mieux ils attendaient 10 000 entrées et que le film en a fait 100 000, donc ils en ont sorti d’autres, mais d’autres n’ont pas marché aussi… des films dont j’ai oublié les titres…mais c’est vrai qu’il y a énormément de films de l’âge d’or, des classiques, c’est à dire des années 50 ou 60, vraiment intéressants qui sont jamais sortis même aujourd’hui, et qu’ on découvre uniquement dans les rétrospectives, les cinémathèques, Beaubourg, la maison de la culture du Japon à Paris...

Pourtant j’ai eu l’impression que les critiques parlaient beaucoup de chef d’œuvre lorsqu’ils parlaient du cinéma japonais, cela aurait pu inciter les spectateurs à aller les voir…

A l’époque, ... il y avait un manque de curiosité, le cinéma japonais était réservé vraiment à une «élite», et puis aussi du fait qu’on ne pouvait voir les films que en copie en salle… dans les années 50 / 60… je me souviens par exemple avoir fait les numéros de l’avant scène, notamment sur l’intendant Sansho de Mizoguchi … en passant des jours entiers dans une espèce de cave avec la moviola, avec les bobines en train de tourner et de changer les bobines, de revenir en arrière, enfin c’était un travail de titans…


 

Pourquoi finalement Rashômon a été le point de départ, est-ce que cela vient plus du contexte de l’époque ou des critiques qui étaient des futurs jeunes cinéastes de la nouvelle vague

Rashômon c’est historique!… c’est parce que c’est le film japonais… un des premiers film japonais qui à être présenté dans un grand festival en Europe, en l’occurrence c’était Venise, et qui a eu le Lion d’or… à l’époque c’était vraiment un coup de tonnerre … d’abord on sortait de la guerre, donc il y avait un sentiment anti- Japonais assez fort, comme il y avait un sentiment anti- Allemands parce que c’était 5 ans après la guerre , c’était très tôt, et on n’avait pas vu de films japonais… et tout d’un coup arrive un film japonais comme ça, un peu martien, si je puis dire, et qui remporte la récompense suprême et ensuite l’oscar en plus…il a eu l’oscar à Hollywood…

C’est parce qu’il a été primé, selon vous, que ça a déclenché toute cette ferveur pour le cinéma japonais …

Oui complètement… parce que je ne pense pas qu’on aurait autant parlé de ce film et de son auteur s’il avait été en compétition mais sans aucun prix… on aurait dit : ah petit film curieux, curieux…film japonais intéressant … le Lion d’or ça représentait quand même quelque chose comme la Palme d’or à l’époque… après il y a eu La Porte de l’enfer qui a eu la Palme d’or à Cannes… et là je crois que les japonais avaient déjà compris qu’il fallait faire des films de samouraïs pour séduire les européens… Les producteurs japonais avaient compris que s’ils faisaient des beaux films en costumes, ça pouvait séduire les Européens, et par conséquent, ça a empêché un certain type de film d’arriver en France…Par exemple Vivre, Kurosawa considérait que Vivre était son meilleur film, or Vivre a eu même s'il a eu un Ours d’argent à Berlin en 52 / 53, il n’a pas eu le même retentissement que Rashômon ou les 7 samouraïs, parce que c’était un film contemporain, dans le Japon moderne de l’époque, avec un thème tragique… ce n’est qu’après, quand les critiques ont vraiment étudié l’œuvre de Kurosawa qu’ils ont vu l’importance de ce film… et dans ses interviews, kurosawa disait : je ne comprends pas, c’est typique des européens de ne parler que de Rashômon, de Macbeth, le Château de l’araignée ou des 7 samouraïs, alors que, pour moi, mon film le plus important c’est Vivre ...

Un autre film japonais avait été présenté avant Rashomon, …c’est un film de série Le Bandit samouraï …

Oui, il y a eu des essais, là c’était la Daiei, qui c’est dit: On va essayer de pénétrer le marché européen puisque ça a l’air de marcher… sauf que évidemment ils ont envoyé des metteurs en scène secondaires, et ça n’a pas pris… en France il y avait une vision assez noble du cinéma japonais, donc quand on voyait des petits films de samouraïs, comme ils en produisaient des dizaines et des dizaines par an, ça plaisait moins,... à l’époque c’était très méprisé… ce qui marchait c’était uniquement les grands auteurs, les grands cinéastes, enfin, ceux qui étaient connus...

En fait, ils ont peut-être privilégié l’exotisme avant la qualité…

Oui, exactement…alors l’exotisme c’est un mot important parce que ça jouait à plein, mais ça pouvait jouer contre aussi...

 

 

Pensez-vous que la lecture des films japonais a pu être influencée par le courant japonisme de la fin du 19°siecle : Van Gogh, Claudel et les autres… ?

Avant le cinéma il y avait déjà eu la mode du Japon. Après 1868 quand le Japon c’est ouvert, il y eu toute cette mode pour un pays qu’on ne connaissait pas…il y a eu très peu de Français qui sont allés là-bas, mais c’était par exemple Pierre Loti, Bataille, Claudel… avec des a priori culturels européens, … par exemple, l’opéra, Madame Butterfly, c’est très beau mais en même temps c’est la vision vraiment européenne du Japon... Je pense que les quelques européens qui sont allés au Japon à l’époque, en on retenu ce qu’ils voulaient voir, eux. Seuls quelques historiens du Japon, qui ont vraiment habité au Japon pendant très longtemps ont pu éviter ça… je pense que c’est une question de temps pour éviter et dépasser la superficialité… il faut habiter au Japon pendant quelques années et là, je crois que effectivement, on peut avoir une autre vision, c’est-à-dire pas une vision extérieure, mais une vision intérieure, interne au Japon et à sa culture, et non pas regarder et effectivement être frappé uniquement disons, par les aspérités culturelles…

En fait tout ce que les explorateurs ont vécu au Japon et tout ce qu’ils ont retranscrit dans leurs livres, et même ce qu’ils ont ramené comme objets, cela a donné une sorte d’imaginaire collectif français par rapport au Japon… et vous ne pensez pas que plus tard les critiques ont eu ce même imaginaire, cette même vision et ont fait une lecture des films japonais par rapport à tout ça…

Oui, c’est ça, c’est une question de lecture…c’est-à-dire pour en rester au cinéma, la plupart des critiques aujourd’hui ne connaissent pas le Japon, ne sont jamais allés au Japon, ne connaissent pas la langue, à part quelques mots comme «zen», «kimono» ou «geisha» et ils ont forcément une lecture différente, une lecture personnelle mais extérieure… moi je suis obligé d’avoir une vision différente parce que je suis allé au Japon, j’ai habité au Japon, j’ai vu des gens au Japon, cinéastes ou autres, et donc j’ai forcément une vision différente, je pense moins superficielle parce que je me réfère aux éléments de la culture japonaise et non pas aux éléments de la culture occidentale qui regarde le Japon…

Justement, j’ai remarqué qu'à la fin des années 70, on comparait souvent Ozu, à la philosophie Zen. Vous étiez alors un des seul, à ce moment là, à considérer ce rapprochement comme une étiquette un peu facile, un cliché...

Un cliché …c’est vrai…car par exemple dans le cas de Ozu, s'il est vrai que l’influence du bouddhisme a été réelle dans son œuvre, en tout cas vers la fin…le Zen est devenu n’importe quoi aujourd’hui… il y a une pub qui vous dit que n’importe quel produit est Zen, vous êtes Zen… enfin, ça ne veut plus rien dire, c’est passé dans le langage commun…alors je crois qu’il y a effectivement beaucoup d’abus comme ça, à partir de mots passe-partout, mais il faut étudier vraiment en profondeur, ...
Ozu était bien influencé par le bouddhisme, ça c’est vrai parce que ça se voit dans son œuvre et dans ses écrits ou les rares entretiens qu’il a accordé à l’époque…mais il y a aussi une nouvelle approche, disons plus contemporaine avec laquelle je ne suis pas toujours d’accord, par exemple le livre du Japonais Hasumi sur Ozu édité au « cahier »…il prend le contre-pied de tout ce qui a été dit et écrit sur Ozu…par exemple, on a dit de Ozu que c’est le cinéaste le plus Japonais et c’est pour ça qu’on ne voyait pas ses films, parce que les Japonais pensaient qu’on ne le comprendrait pas, parce que c’était trop japonais… et lui dit que c’est le moins Japonais !… enfin tout est comme ça, donc c’est un peu facile aussi…c’est une tendance disons assez formaliste et je ne suis pas toujours d’accord...

Parmi tous les entretiens que vous avez eu avec les cinéastes, vous avez dit une fois que vous étiez très étonné par les réponses fournies (je crois que c’était Kurosawa)…comment vous l’expliquez ? Y a t-il toujours eu un décalage entre ce que vous aviez vu et ce que eux ont voulu faire ?…

Justement il y a encore un autre décalage entre ce que nous, on voit en tant que critiques européens et puis eux…même moi j’ai dû poser des questions assez abstraites, et Kurosawa était au contraire extrêmement concret, ... je me souviens lui avoir parlé dans Kagemusha de scènes et de plans irréels notamment pour la scène de bataille sur fond de ciel rouge, la nuit; alors là on ne s’est pas compris et il était un peu fâché parce qu’il pensait que je l’accusais de faire de l’esthétisme ou des choses comme ça, alors qu’il m’a expliqué que c’était autre chose…ça n’a rien à voir…mais c’était comme beaucoup de cinéastes japonais d’ailleurs, quelqu’un de très concret… et quand on lui parle dans un langage, disons un peu à l’Européenne, un peu abstrait, un peu symbolique, il ne suit pas du tout…

Oshima aussi, revendiqué le fait que justement, on cherchait à chaque fois à lui poser des questions sur le symbole de tel passage ou de telle image, alors qu’en fait, il l’ignorait lui-même …

Ca c’est la vision des critiques occidentaux qui voient des symboles partout parce qu’ ils ne comprennent pas, ils n’ont pas justement les références…alors que si un Japonais leur explique que ça, ça correspond à telle chose dans la vie et la culture japonaise, là on comprend mieux… mais comme ils n’ont pas ces références, ils transposent tout ça sur un autre plan… donc c’est complètement irréel… c’est dé-réalisé, et ça donne des résultats quelque fois un peu étonnants…

 

Peut-on expliquer le succès du cinéma japonais, par rapport au contexte cinématographique de « la politique des auteurs » et de « la nouvelle vague »? Je pense par exemple à Oshima , pourquoi finalement l’empire des sens fut le film japonais qui a le mieux marché en France, comment l’expliquer… est-ce à cause du contexte, du procès, de la censure… ?

Non, l’empire des sens, c’est plutôt à cause du sujet, tout ça ce sont les années 70, post 68, révolution culturelle et révolution sexuelle… c’était quand même le premier film, entre guillemet « porno » d’auteur, c’est à dire qu’on avait pas vraiment vu ça au cinéma, il y a eu plein de petits films soi-disant « d’auteurs » , érotiques, pornographiques etc.... mais il n’y avait pas eu de chefs-d’œuvre, disons de grands films sur l’érotisme en version « hard », … le film a été proposé à Cannes qui l’a refusé parce qu’évidemment ils ont été effrayés, mais je pense que c’était une erreur ...donc c’est passé à la quinzaine, … et comme c’était l’époque où l’on commençait à voir les premiers films pornos, ça a eu un succès de scandale… à l’époque pour l’Empire des sens c’était le scandale de la représentation sexuelle à l’écran, ... j’ai interviewé Oshima il n’y a pas très longtemps, à l’époque où il a fait Tabou,... je lui ai dit : est-ce que vous pourriez  aujourd’hui faire l’Empire des sens, enfin un remake, il m’a dit NON, parce que la révolution sexuelle est passée par là et aujourd’hui les jeunes sont complètement libérés, ça ne les intéresse plus…

 

 

Pour finir, que peut-on dire du cinéma japonais aujourd’hui, est-ce qu’il a la même réception, est-ce que ça amène le même nombre de spectateurs ou est-ce que c’est toujours une « élite » qui va voir les films japonais ?… enfin je parle des films d’auteurs, je ne parle pas des mangas et autres animés…

On voit beaucoup plus de films, à mon avis c’est complètement mélangé, avec un peu de recul on s’apercevra que la moitié des films ne méritaient pas de sortir,… mais il y a un phénomène aussi de masque, c’est à dire de festivals… il y a tellement de festivals partout dans le monde qu’on peut tout présenter… et en plus le cinéma asiatique est à la mode en général, donc il y a partout des hommages, des rétrospectives, des panoramas du cinéma japonais… même Cannes montre des films en compétition qui autrefois étaient refusés ou mis dans des sections parallèles comme Shara ou Gémifif , le film de Kyoshi Kurosawa… La perception a changé parce que c’est devenu un phénomène de masse et moi je pense que, en fait, ce qui n’a pas changé, c’est que les vrais auteurs et les vrais bons films trouvent leur public… Kitano, qui est quand même assez exceptionnel, a trouvé son public… pas au début, c’est pareil il a fallu attendre un peu, mais je crois que le film qui a déclenché tout, je crois c’était Hanabi, …De toute façon, ce qui intéresse aujourd’hui dans un film japonais, il faut que ce soit compliqué, bizarre, un peu horrible si possible… ça explique le succès de Ring… c’est une variation moderne sur un thème de films de fantômes que les Japonais font depuis 100 ans… ces films de fantômes c’est un genre à part extrêmement prolifique dans le cinéma japonais Donc ça, ça marche parce qu’il n’y a pas besoin de références… par exemple les jeunes qui vont voir ça, ils ne connaissent pas les films de fantômes japonais, mais ils connaissent les films de fantômes américains… enfin les films de revenants et de surnaturel et donc ils font l’amalgame…

Une dernière question, faut-il aimer le Japon pour aimer les films japonais?…

Oui je pense… qui aime bien châtie bien…pas forcément mais tout de même, c’est ce que je disais au début, c’est-à-dire je crois que si on s’intéresse vraiment à un cinéma national, je ne vois pas comment on peut se désintéresser du contexte national et culturel….